La fin de l’âge d’or du télétravail et le début du “RAB” (Retour au bureau)
Le leader du télétravail, Zoom, qui demande à ses salariés de retourner au bureau, Amazon qui envoie des lettres de rappel aux récalcitrants et grévistes désireux de rester en télétravail, Google qui conditionne la performance du salarié sur sa présence au bureau… Les groupes américains battent le rappel des troupes après avoir poussé les salariés au télétravail pendant la pandémie. Mais les employés résistent.
C’est un comble pour une entreprise qui a bâti son succès sur le télétravail. L’entreprise Zoom, qui a connu une ascension fulgurante pendant le confinement en permettant à des millions de salariés de pouvoir participer à des réunions à distance, a demandé à ses employés de retourner au bureau. Fini le télétravail à 100%. “L’entreprise a déclaré qu’elle pensait qu’une “approche hybride structurée” était la plus efficace et que les personnes vivant à moins de 80 km d’un bureau devraient travailler en présentiel au moins deux fois par semaine”, rapporte la BBC. Comme beaucoup d’entreprises, Zoom avait poussé ses salariés au télétravail durant la pandémie de Covid-19. En septembre 2022, 75% des employés de l’entreprise travaillaient totalement à distance contre seulement 1% des employés qui avaient une “présence régulière au bureau“.
“Il s’avère que Zoom et ses 8 000 employés sont confrontés au problème fondamental du travail hybride que la technologie de l’entreprise tente de résoudre : comment être productif et créatif sans être au même endroit“, relate The Wall Street journal. Et pour cause l’entreprise défend sur son site internet des “rencontres en face-à-face depuis n’importe quel appareil”, insinuant ainsi que les relations professionnelles peuvent être aussi efficaces à distance qu’en présentiel.
Grève chez Amazon
Mais Zoom n’est pas un cas isolé aux États-Unis. Depuis plusieurs mois, de grands groupes américains battent le rappel des troupes. Cette tendance est telle que la presse américaine l’a baptisée le RTO, pour Return to office, que Courrier International traduit par “Retour au bureau”, RAB. Et Amazon en fait les frais. En février dernier, le PDG du groupe, Andy Jassy avait adressé une lettre à ses employés annonçant au moins trois jours par semaine de présentiel obligatoire. Il écrivait alors : “Il n’est pas simple de faire revenir plusieurs milliers d’employés dans nos bureaux à travers le monde, c’est pourquoi nous allons donner du temps aux équipes qui doivent faire ce travail pour élaborer un plan“.
Mais la fronde est telle qu’en mai, des salariés d’Amazon ont organisé une grève pour protester contre le retour au bureau et 20 000 personnes ont signé une pétition exprimant leur désaccord sur cette nouvelle politique. La polémique a encore pris de l’ampleur quand, le 9 août, des employés ont reçu un mail leur demandant d’adhérer à cette nouvelle politique : “Nous vous contactons car vous ne répondez pas actuellement à nos attentes de rejoindre vos collègues au bureau au moins trois jours par semaine, même si le bâtiment qui vous a été assigné est prêt. Nous nous attendons à ce que vous commenciez à venir au bureau trois jours ou plus par semaine maintenant”.
Surveillance chez Google
Plusieurs entreprises ont ainsi décidé de serrer la vis et de surveiller la présence de leurs salariés au bureau. C’est notamment le cas de Google dont la DRH, Fiona Cicconi écrit dans une note : “la présence sera vérifiée grâce aux données enregistrées sur les badges. Ceux qui ne viendront pas seront rappelés à l’ordre et la présence au bureau sera prise en compte dans les évaluations de performance”. Si le retour au bureau est si difficile c’est que certains salariés ont apprécié ce meilleur équilibre vie privée – vie professionnelle quand d’autres ont déménagé hors des grandes villes pour bénéficier d’un cadre de vie moins stressant.
Apple, Lyft, Disney… les grands groupes américains ont désormais tous le même cap : faire revenir leurs salariés au bureau. Pour les entreprises de la tech, qui licencient à tour de bras, l’enjeu est de retrouver de la cohésion mais aussi de la productivité. Deux récentes études, une du Massachusetts Institute of Technology (MIT) et l’autre de l’OCDE, ont montré que le télétravail à 100% nuisait à la productivité des salariés. Au contraire, la productivité atteint un pic avec un à deux jours de télétravail.
La France, elle, fait partie des pays les plus réfractaires au télétravail, selon une nouvelle étude de l’institut Ifo et de Enconpol Europe, relayée par Les Echos. Les résultats, portant sur un échantillon de 42 400 répondants dans 34 pays développés, montrent que les Français télétravaillent en moyenne 0,6 jour par semaine contre 1,7 au Canada ou 1,5 au Royaume-Uni.
Et pourtant, les travailleurs français voudraient eux attendre le niveau de leurs collègues américains avec 1,4 jours de télétravail par semaine. Reste à convaincre les employeurs qui freinent des quatre fers.
SOURCE : Novethic