Semaine de quatre jours : en France, le mouvement gagne du terrain malgré les réticences
C’est une première en France à cette échelle : la métropole de Lyon propose à plusieurs milliers de ses agents de passer à la semaine de quatre jours. D’autres services publics et des entreprises ont aussi sauté le pas, mais le mouvement reste minoritaire en France.
Et si vous passiez à la semaine de quatre jours ? C’est la possibilité que la métropole de Lyon, la deuxième agglomération de France, ouvre à plus de 5 000 de ses agents. L’appel à volontariat est ouvert jusqu’à la fin mai. “C’est une expérimentation avec des volontaires pour une durée d’un an,détaille le président de la métropole, l’écologiste Bruno Bernard_. Avec plusieurs formules au choix : soit principalement travailler quatre jours, 9 heures par jour ou 8 heures 45 par jour ; soit travailler quatre jours, une semaine sur deux. C’est une formule proposée en pensant notamment aux familles qui ont des gardes alternées.”_
Agente de catégorie A à la délégation solidarité, habitat et éducation, Valérie Dario tentera l’expérience à compter de septembre : “On a peu d’espace pour gérer par moments des contraintes d’ordre privé, pouvoir prendre un peu de recul, faire du sport, pouvoir caler des réunions, appeler une entreprise pour réparer la fuite… Ce genre de choses du quotidien.” Elle garde sa rémunération et perd quelques RTT pour compenser.
“C’est vraiment l’opportunité de reprendre aussi un équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle.”
Un autre agent de la métropole, Bertrand Manin, souligne le gain financier que la nouvelle organisation peut représenter : “À la direction des finances et contrôle de gestion, on est 80 agents à peu près. Il y en aurait seulement 10 % qui s’engageraient dans l’expérimentation. Des personnes qui sont plutôt sur une fin de carrière, quelques personnes qui sont à temps partiel et qui remonteraient à 100 %. Donc il y a un gain de pouvoir d’achat.”
Le passage à quatre jours se veut aussi une mesure d’égalité hommes-femmes, pour lutter contre le temps partiel subi : “On a plusieurs centaines d’agents, souvent des femmes, qui sont à 80 % parce qu’elles ont besoin d’une journée pour leur vie familiale, ce qui les a obligées à diminuer leur temps de travail, décrit le président de la métropole, Bruno Bernard. Et là, elles vont pouvoir faire le choix de repasser à 100 % en travaillant sur quatre jours. Donc un gros gain de pouvoir d’achat et de cotisations sociales, notamment pour la retraite.”
L’enjeu pour la métropole de Lyon est aussi de rendre plus attractifs ces postes et résoudre les problèmes de recrutement. Un premier bilan de l’expérimentation sera dressé à mi-course, d’ici six mois.
Au niveau national, un mouvement encore timide
La France est, de ce point de vue, bien loin de la Belgique. Là-bas, depuis six mois et une nouvelle loi, ce sont les travailleurs (du public et du privé) qui peuvent demander à ne travailler que quatre jours par semaine. En France, c’est une décision qui relève toujours de l’employeur. Et selon une étude d’un cabinet de ressources humaines, seulement 5% des entreprises françaises avaient adopté la semaine de quatre jours, début 2022. Depuis, beaucoup d’autres s’y aventurent, principalement des PME, dans des secteurs variés, comme le recyclage, l’énergie ou l’informatique.
Mais de grands groupes s’y mettent aussi, par exemple dans le conseil : Accenture propose depuis un an la semaine de quatre jours à ses 10 000 salariés en France, quand l’un de ses concurrents, KPMG, tente un dispositif réservé aux jeunes parents.
Et comme à Lyon, quelques services publics lancent des expérimentations : la Caisse nationale d’assurance-vieillesse, l’Urssaf de Picardie ou le CHU de Nantes dans une seule unité de soins, pour les personnels non-médicaux (infirmiers et aides-soignants). Ce qui motive les employeurs, c’est surtout d’attirer et de fidéliser les salariés, surtout dans certains secteurs “en tension”, comme l’hôpital.
Du côté des salariés, pas d’engouement massif
À la CNAV par exemple, seule une vingtaine d’agents sur 3 600 ont choisi cette option. À l’Urssaf Picardie, quatre sur les 200 éligibles… Ce qui fait hésiter les salariés, c’est la peur d’avoir des journées plus longues et intenses, pas forcément compatibles avec les horaires de crèche ou d’école.
Et quand ils ont le choix, les salariés préfèrent majoritairement avoir plus de RTT à poser quand ils le souhaitent. La semaine de quatre jours semble plus rigide, dans la mesure où les travailleurs ne choisissent pas toujours leur troisième jour de repos.
SOURCE : RADIO FRANCE